Discours de soutenance de thèse de Jérémy Rubenstein "La sédition militaire de Semana Santa de 1987 : le peuple au secours du régime démocratique argentin"
Monsieur le Président, Mesdames et
Messieurs les Membres du Jury, je vous remercie de votre présence aujourd’hui,
ainsi que, très sincèrement, d’avoir porté votre attention sur ma recherche.
Ensuite, je voudrais commencer par
exprimer mon profond étonnement de me retrouver ici. Cette surprise touche,
tout à la fois, à l’aboutissement d’une thèse, à son sujet mais aussi, plus
simplement, au fait d’avoir initier des études supérieures qui mènent à ce
jour. Car pas grand-chose ne laissait
prévoir qu’il me serait donné d’exposer les conclusions d’une recherche savante
dans l’enceinte d’une université. Pour expliquer, et sortir, de cet état
d’étonnement un peu béat, il me faut remonter la particularité d’un parcours
que je n’oserais qualifier de professionnel, tant il est éloigné de toute
perspective de carrière et composé de retournements parfois surprenants.
Car s’il est déjà peu commun, dans le
paysage étudiant français, de commencer des études supérieures à 27 ans, il est
tout à fait inhabituel que la vie antérieure soit celle d’un aventurier. Ce mot
d’"aventurier" me semble peu adapté à cette vie, car je ne me concevais pas
ainsi. Mais, rétrospectivement, je n’ai pas trouvé d’autre terme, aux souvenirs
épars de ramassage de café dans une plaine d’Equateur, de tenancier de bistrot
dans ce même pays ou de commerce un tant soit peu illicite d’émeraudes dans un
pays voisin (il y a prescription).
C’est donc la jonction entre cette
vie peu ordonnée, étrangère aux études académiques, et je dirais même aux marges
de toute institution, cette vie marginale donc, et l’écriture d’une thèse en
Histoire, dont le sujet n’a rien de marginal qui m’interroge aujourd’hui.
Car ma thèse porte en grande partie sur des institutions dures d’une
République : son système judiciaire, son Armée, son pouvoir exécutif ou
des partis politiques centraux.
Et ce n’est pas seulement mon passé
qui soit distant de cet objet d’étude. Dans un roman qui paraît ces jours-ci à
Buenos Aires, Pablo Strucci décrit un personnage français appelé Jerremy, dont
il évoque l’activité principale ainsi : « Jerremy vino a la Argentina
para estudiar el alfonsinismo. Tan ridiculo como suena. » Soit, « aussi
ridicule que cela puisse paraître, Jérémy est venu en Argentine pour étudier
l’alfonsinisme. ». Cette description, faite par un ami proche et qui m’a
fait beaucoup rire, est marquée du sceau d’une certaine incompréhension pour l’objet
de ma recherche. Je suppose que c’est un peu le lot commun des universitaires
que de rencontrer une grande perplexité chez leurs proches quand ils évoquent leurs
objets d’étude. Dans ce cas, la réflexion de Pablo Strucci révèle une autre
distance avec mon sujet, puisqu’il se fait le témoin d’une partie de ma vie
actuelle, en particulier mon activité dans un mouvement de militantisme
culturel qui fait la satire des pouvoirs établis, comme un vague cousin du
situationnisme. Il me suffit d’évoquer la Patate transgénique Monsanto (una
Papa en espagnol) que nous avons élu sur le parvis de la Cathédrale de Buenos
Aires, quelque jours après que Monseigneur Bergolio soit élu Pape (également
Papa en espagnol) pour comprendre la distance critique que je peux entretenir envers
les institutions. Dans cette perspective, on comprend que pour Strucci et
d’autres amis proches, l’étude d’Alfonsín puisse paraître surtout comme une
incongruité.
Avec cela, je veux dire que si
auparavant j’ai pu être très éloigné des études supérieures, aujourd’hui je n’ai
pas une empathie particulière avec la plupart des acteurs de mon sujet d’étude.
Je voudrais donc ici revenir sur le parcours intellectuel qui m’a mené à cette
période des années 80 et, plus spécialement, sur la crise de Semana Santa –ce
soulèvement militaire suivi d’une mobilisation inédite de la population -de
1987.
Pour en arriver là, il faut que
j’évoque auparavant brièvement ce que j’ai rencontré sur les bancs de l’université,
qui m’avait singulièrement manqué antérieurement.
Rigueur, respect et liberté, voilà le
singulier attelage que j’ai trouvé à l’Université. Rigueur des mots, de la
méthode et des raisonnements. Le respect de l’écoute que je pense être la
caractéristique la plus saillante de notre société savante, car sans lui il
serait entre autre impossible de marquer son parfait désaccord avec un énoncé
contesté. Enfin liberté, précisément de l’énoncé qui n’admet aucun formatage,
aucune limite si ce n’est celle de la rigueur précédemment évoquée.
Aussi, de la simple formalité du
titre universitaire que j’étais initialement venu chercher, je suis passé assez
rapidement à une passion pour des outils intellectuels qui permettent d’aborder
des sujets que l’on apprend aussi à construire. Ces outils en mains (ce qui
correspond à une Licence), je ne pouvais me résoudre à ne pas les utiliser.
C’est ici que Annick Lempérière m’accueillit pour effectuer ma première
enquête, par laquelle je tâchais aussi bien de résoudre quelques interrogations
sur la gauche en générale, que sur le phénomène de guérilla en Amérique latine
où j’avais longtemps vécu (y compris dans un pays où elle est encore active).
Néanmoins, je choisissais un pays qui m’était totalement inconnu et que je ne
considérais d’ailleurs pas tout à fait comme latino-américain, l’Argentine.
A bien des égards, cette première
enquête en Argentine a décidé de la suite, puisque je n’ai plus jamais cessé de
m’intéresser à l’Histoire de ce pays (où je réside depuis). En revanche, c’est
bien moins le passé que j’étudiais qui m’a surpris que la présence de ce passé
dans le présent. Car s’il était naturel que dans les locaux du CEDINCI où je
trouvais mes principales archives et dans les quelques cours que je suivais,
nous parlâmes volontiers des années 1970, des différentes guérillas, et de la
répression de l’Etat argentin, il était en revanche bien plus surprenant
d’aborder ces mêmes thèmes au sortir d’un théâtre ou à la terrasse d’un café
avec des parfaits inconnus (2005). Je revenais en France après quelques mois à
Buenos Aires, avec la certitude d’avoir visité un pays saturé de son passé,
avec des militants qui ne cessaient paradoxalement de dénoncer un pays sans
mémoire, mémoire qui s’affichaient dans toutes les dénonciations. En somme, il
me semblait que nous étions dans la configuration d’un « passé qui ne
passe pas » pour reprendre la formule de Henry Rousso. Ce qui m’amenait à
me détourner presque totalement de mon sujet de maîtrise pour construire une
étude sur cette mémoire si obsédante. Cela donna lieu à un mémoire de DEA qui
cherchait à poser des jalons à la construction mémorielle des années 1970, plus
précisément de la dictature.
J’abandonnais aussi le champ des
guérillas ou de la gauche radicale car s’il est vrai que je trouvais là de quoi
alimenter des questionnements assez personnels sur la gauche en général, avec
laquelle j’ai des accointances certaines, je me suis rendu compte avec cette
année de maîtrise que je me lassais très vite de sa rhétorique. En somme, je
n’étais pas prêt à cohabiter plusieurs années avec des sources qui me
parleraient de « déviance petite-bourgeoise » ou de « compañeros
y compañeras construisant un Homme Nouveau » et de complexes raisonnements
jargonneux sensés expliquer la petite différence avec un parti similaire. S’il
faut passer plusieurs années sur une thèse, autant prendre du plaisir avec les
sources. J’avais donc alors compris qu’il me faudrait construire un sujet qui
aborde de multiples acteurs (ce qui implique des sources tout aussi multiples).
Et, en effet, plus tard, ce sera avec enthousiasme que j’abordais chaque
nouveau chapitre de ma thèse, qui présente un acteur très différent que celui
traité dans le chapitre antérieur.
Pour revenir au DEA, j’écrivais un
mémoire qui reste une curiosité, entre les jalons d’une future thèse et des
réflexions peu abouties. « objet universitaire non-identifié »
m’avait secrètement glissé un membre du jury. Néanmoins ce mémoire se plaçait
au cœur de deux questionnements relativement universels et très souvent liés.
D’une part, l’existence des camps de concentration clandestins argentins
renvoie à leurs rôles dans notre modernité, question qui obsède depuis la prise
en compte de la spécificité de la solution finale. D’autre part, comment une
société vit-elle après cette expérience extrême, comment l’insère t-elle dans
le récit de son passé.
Mais, nouveau retournement,
j’abandonnais progressivement mon sujet de prédilection qui aurait porté sur la
mémoire de la dictature argentine jusqu’à aujourd’hui. Ici, ce sont plusieurs
questionnements historiographiques, et je dirais plus réfléchis, qui m’ont mené
à me défaire de ces sujets obsédants. D’une part, entre le moment de mon
premier voyage et mon installation en Argentine, une véritable politique
mémorielle d’Etat sur les années 70 s’est constituée. Et bien que son
observation quotidienne soit d’un grand intérêt, son actualité ne permet non
seulement aucun recul mais aussi très peu de visibilité, car nous sommes
clairement dans un cycle qui n’est pas encore refermé. En partie induite à ce
cycle, il y avait aussi une prolifération d’études similaires qui réduisait
d’autant toute prétention à l’originalité de mon étude.
D’autre part, l’étude historienne de
la mémoire me semblait devoir se remettre en partie en question après une
période particulièrement prolifique depuis, disons les Lieux de Mémoire de
Pierre Nora jusqu’à la synthèse sur les usages du passé, du milieu des années 2000,
écrite par Enzo Traverso ici présent. Elle avait développé des instruments très
pointus qui sont un apport heuristique considérable à l’histoire politique. Je
reprends, pour illustrer cet apport, l’analyse détaillé du transfert des
cendres de Jean Moulin au Panthéon –qui me semble un modèle de ce que peut
apporter l’histoire de la mémoire à l’histoire politique - qui permet à Henry
Rousso de dresser le paysage politique de 1964. En plantant son observatoire de
la mémoire de la Résistance, l’auteur dresse un tableau précis de la
configuration politique française de 1964. C’est ainsi que j’ai compris
l’histoire de la mémoire, comme un observatoire du politique ; en
l’occurrence, la construction d’une représentation dominante de la Résistance
des années 40 permet de comprendre les forces politiques en présence dans les
années 60 françaises.
Mais la multiplication d’études qui
empruntent cette méthode, souvent de qualité, menait à se demander si nous ne
risquions pas de nous installer dans une histoire des commémorations ou des
lieux de mémoire, en nous enfermant dans un réduit de notre discipline. De là, je
me demandais si la mémoire pouvait être en mesure de peser directement sur les
évènements. C’est-à-dire une mémoire, non
plus considérée comme un moyen d’aborder l’événement ou une configuration
politique particulière, mais directement comme moteur de l’événement.
Enfin, la troisième considération
historiographique qui m’interrogeait était le singulier vide de la littérature
universitaire sur les années 80, qui apparaissent très souvent coincées entre
deux obsessions universitaires nationales, les années 70 et 90. Essentiellement
pour leur violence, les années 70 interrogent de nombreux universitaires, qui
répondent ainsi, en grande partie, à une demande sociale. De même, les années 90
sont largement perçues comme le bouleversement d’un pays qui a été mené à marche
forcé vers l’abîme de la crise générale du pays de 2001. Ces deux décennies
monopolisent ainsi largement l’intérêt des universitaires. Ce double intérêt se
traduit, dans ses formes les plus extrêmes, par un discours sur le passé qui
fait l’impasse sur la décennie qui, chronologiquement, les articule.
Dans ce contexte, s’intéresser à la
courte décennie des années 80 m’apparaissait comme une nécessité, car cette
impasse me semblait nourrir bien des raccourcis (par exemple ce lien direct
entre la dernière dictature et le ménémisme des années 90, très souvent fait
dans une bonne partie de la gauche).
Ces trois questionnements m’ont
progressivement mené au sujet de cette thèse, cette crise de Pacques de 1987,
moment charnière des années 80 (et qui oblige à comprendre l’ensemble de la
décennie dans sa spécificité). Je n’arrive malheureusement pas à me souvenir avec
exactitude si cette idée d’une mémoire qui pèse sur les évènements précède mon intérêt
pour Semana Santa ou si cette crise m’a amené à penser la mémoire comme un
possible moteur de l’évènement. J’en conclus que les deux se sont emboités dès
que j’ai compris que le fait significatif de Semana Santa n’est pas le
soulèvement militaire mais la mobilisation populaire qui lui fait face. La
population argentine se dressait contre ce qui était perçu comme un retour du
passé, une des plus grandes manifestations du siècle était motivée par la mémoire
d’une dictature honnie.
Je m’interrogeais donc sur un événement,
essentiellement avec mes outils d’histoire de la mémoire –c’est-à-dire en
suivant avec attention tous les vecteurs de mémoire (comme les appelle Henry
Rousso). Car s’il y avait une mobilisation contre le passé, c’est donc qu’il y
avait une construction mémorielle qui rendait ce passé abjecte.
Jusque là je ne rencontrais pas de
grande difficulté, je pourrais dire que j’étais en terrain connu. Mais la
mobilisation de Semana Santa a cela de particulier qu’elle semble, au moins
dans les sources, unanime. Donc, à la nécessaire question de savoir qui se
mobilisait contre le passé honni, je finissais par m’avouer : le peuple.
Et là, à nouveau, je me retrouvais
devant un sujet auquel j’étais peu prédisposé, du fait d’une méfiance instinctive
pour quiconque s’autorise à le nommer. Pourtant il s’agit de l’acteur central
de ma thèse, qui propose plusieurs manières de l’aborder. Cependant, malgré les
différents dispositifs méthodologiques pour traiter du peuple, il me semble impossible
de considérer la présence du peuple autrement qu’en prenant parti : autrement
dit, affirmer la présence du peuple est une position clairement politique,
avant toute approche scientifique qui ratifierait cette présence.
Evidemment, le peuple protagoniste principal
de Semana Santa interroge nécessairement la nature du régime politique inauguré
en 1983. Car on définit en grande partie la nature d’un régime selon la place qu’occupe
le souverain de la modernité politique. Ici, mon approche a cherché à se
démarquer méthodologiquement des approches politistes ou de philosophie
politique, dans le sens où j’ai essayé de faire abstraction, au moins
momentanément, des critères classiques qui définissent la nature des régimes
politiques. Cette démarche intellectuelle a pour objectif, outre la suspension
du jugement de valeur, de permettre une attention soutenue aux changements qui
s’opèrent avec l’événement étudié. Concrètement, le cours des évènements et les
décisions prises durant Semana Santa définissent le régime politique dans
lequel l’Argentine vivrait. Ainsi, on comprend tout l’enjeu d’une décision,
prise en quelques minutes, par le président Alfonsín qui a le choix entre
prendre la tête de la mobilisation populaire pour aller réduire les séditieux
ou aller seul négocier avec eux. Dans la première option de ce choix, c’est un
tout autre régime qui se dessinerait car le peuple aurait été l’acteur de l’évènement
qui définit le régime. Autrement dit, le peuple serait allé à l’assaut de sa
Bastille.
Nous savons qu’il n’en est rien. Le
peuple est resté spectateur, si bien que ce sont des acteurs institutionnels qui
ont résolu la crise. La conséquence est que la place du peuple dans le régime
est celle de spectateur qui vote de temps à autre entre différents partis qui,
eux, gouvernent. Le peuple protagoniste est ainsi congédié, et selon ma
définition du peuple il est même dissous au profit de figure institutionnelle
(avec un “p” minuscule, c’est-à-dire réel, mobilisé dans la rue, et non sa
fiction institutionnelle).
Cette approche décrite explique le
peu d’intérêt que j’ai porté à des débats, qui occupent pourtant très centralement
les intellectuels des années 80, sur le contenu de la Démocratie. Car, dans ma
perspective, nul besoin de chercher à savoir ce que serait une bonne démocratie
ou simplement une démocratie, il convient seulement d’observer ce que réalise
le régime politique en place, et quel rôle il octroie à chacun. Il m’a semblé
que c’était la démarche la plus honnête pour un historien.
Comme j’essayais de le dire, mon
intérêt s’est bien plus porté sur le peuple que sur le nom du régime politique
argentin de 1987. Néanmoins, dans un paradoxe apparent, ma thèse n’aborde
pratiquement jamais le peuple directement. Chaque chapitre présente un acteur institutionnel
ou, du moins, bien identifié.
J’ai fait apparaître les acteurs selon
leur chronologie d’apparition dans la crise de Semana Santa. Ainsi, le premier
chapitre s’intéresse au monde judiciaire, car c’est une décision de justice qui
déclenche la crise, quand un militaire refuse de se présenter devant le
tribunal qui le convoque. Ce militaire apparaît donc comme le second acteur, et
mon second chapitre traite de l’Armée et des militaires séditieux.
L’intervention d’Alfonsín dans la crise est l’occasion d’un troisième chapitre qui
revient sur l’ensemble de la carrière de ce radical et de son parti. Le chapitre
suivant, j’ai tâché de dresser un tableau des principaux partis politiques qui
se mobilisent aussi durant la crise. Il me semblait aussi impossible de faire
l’impasse sur le rôle particulier des journalistes, des journaux et des médias
en général. Enfin, j’ai tâché de rendre compte du rôle déterminant du Mouvement
des Droits de l’Homme sur la politique des années 80, et sur la constitution d’une
mémoire qui permet, précisément l’apparition du peuple durant la crise.
La logique qui dirige cette
organisation de la thèse cherche à rendre compte du temps court de l’événement,
l’apparition de chaque acteur dans la chronologie de l’évènement rappelle sans
cesse ce temps court. Mais, en même temps, chacun des acteurs s’inscrit dans
son histoire plus longue.
Je le disais, traiter d’acteur
institutionnel pour aborder le peuple semble un paradoxe, mais celui-ci se résout
facilement car chacun de ces acteurs favorisent à sa manière l’apparition du
peuple, qui réagit dans le temps court contre les militaires séditieux ;
mais cette réaction ne peut s’expliquer que par un processus plus long, qui
correspond au changement culturel qui rend inadmissible un nouvelle intervention
militaire. Ce changement culturel est le résultat d’une construction mémorielle
qui se développe entre 1983 et 1987.
Bien, je remercie le public et les
membres du jury pour votre attention.
Discours de soutenance pour l'obtention du doctorat en Histoire
Paris, Université de la Sorbonne, 10 juin 2014
Doctorat obtenu avec la mention "très honorable" et les félicitations à l'unanimité du jury présidé par Enzo Traverso.
Doctorat obtenu avec la mention "très honorable" et les félicitations à l'unanimité du jury présidé par Enzo Traverso.
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