Un petit oiseau pour Musk, une cage pour Assange: la liberté d’expression en régime capitaliste

 

Après de longs mois de poker menteur, Elon Musk a racheté Twitter. Le petit oiseau pour Musk, tandis que Julian Assange crève toujours en prison. Dans ces conditions, qui osera encore dire que capitalisme et liberté d’expression font bon ménage ne sera qu’un menteur.

This Is No Alternative, la devise capitaliste

L’un des grands arguments en défense du capitalisme contre toute autre forme d’habiter le monde serait son efficacité. « Vous êtes bien gentils à vouloir répartir les richesses mais, nous dit-on, ça ne fonctionne pas ». Si vous essayez de réguler quoique ce soit, ce sera le goulag et une économie soviétique (traduire: une ineptie permanente produite par des entreprises monstrueusement bureaucratiques, du genre de la SNCF démantelée en vue de la privatisation).

Même des gens un peu moins bornés que les Talibans du Capital (les néolibéraux qui occupent, entre autre, le gouvernement français actuel) ont toujours tendance à en revenir au capitalisme pour son efficacité supposé. Cette efficacité ne se réfère pas seulement à produire du profit. Pour l’ensemble (talibans et modérés) des défenseurs du régime capitaliste, ce serait tout simplement le seul ordre possible. This Is No Alternative. Autrement dit, c’est l’ensemble des activités humaines qui doivent être géré par les lois du marché. Car c’est efficace.

Un petit oiseau pour Musk

Voyons donc le capitalisme en action dans un domaine: celui de la production du débat démocratique et de l’émergence de vérités. C’est facile à juger. Nous assistons en direct à l’achat de Twitter par Elon Musk. Or, Twitter serait l’outil par excellence du débat démocratique qui lui-même permettrait l’émergence de vérités utiles à la vie en société.

Musk, il est marrant. Musk, il est très riche (probablement la deuxième fortune mondiale après Vladimir Poutine). Musk, il est écologique. Musk, c’est l’avenir stellaire de l’humanité. Bref, tout le monde ne peut qu’aimer Elon Musk. A côté, le culte de la personnalité de Staline c’était petit-bras, de l’artisanat de bras-cassés. Le petit-père des peuples peut aller se coucher, désormais la voie lactée c’est Musk. 

 

Un bon homme d’affaire est d’abord un bon menteur

Mais « Musk », « débat démocratique » et « vérités » sont-ce des mots qui vont très bien ensemble? A l’instar de tout commerçant (pardon, je voulais dire « innovateur »), Musk est un homme de secrets et de mensonges. Les affaires ont besoin du « secret des affaires » et les hommes d’affaires sont des hommes de secrets sans lesquels ils ne ferait pas d’affaires. Musk est un homme d’affaire. Donc de secrets. Et de mensonges: il n’est que voir ses multiples entourloupes accompagnant son rachat de Twitter. Une partie de poker menteur qu’il a mené de main de maître, c’est-à-dire en menteur patenté.

Résultat: le maître des mensonges est propriétaire du supposé outil des débats démocratiques. Le petit oiseaux bleue où se retrouvent toutes les tendances des débatteurs occidentaux est dans la main d’un menteur mégalomane. Et l’Occident se targue de démocratie. Et, donc, de « liberté d’expression ». Et Musk se dit fondamentaliste (taliban?) de cette liberté d’expression.

Julian Assange: les vérités documentées au cachot

Dans le même temps, qui révèlent des documents à même d’alimenter un débat éclairé sur la politique est systématiquement pourchassé. Julian Assange est en prison. Edward Snowden est exilé. Tous deux ont apporté des documents qui permettent l’émergence de vérités utiles au débat démocratique.

A t-on entendu Musk s’indigner du véritable bâillon placé sur la bouche de la citoyenneté mondiale à travers le traitement infligé à Julian Assange? Non, lui défend la « liberté d’expression » de Donald Trump. Trump, Musk, deux hommes d’affaire, deux menteurs. Ils sont la meilleure représentation qui soit de la liberté d’expression en régime capitaliste.

 

Publié sur Hiya! le 2 novembre 2022

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