Guerre sociale: Jaunes et Gouvernement au service du Patronat

 

Les “jaunes” fait parti d’un vocabulaire politique qui a un peu disparu, balayé par des dizaines d’années de propagande patronale, propagande longtemps dirigée par un ancien militaire, en toute cohérence avec la guerre sociale que le MEDEF nous mène.

Les jaunes désignaient les casseurs de grève. Longtemps, le “jaune” était considéré comme la pire des raclures parmi les travailleurs. C’était celui qui trahissait la cause commune, les avancées sociales pour tous, afin d’obtenir quelques bénéfices personnels. Une crevure doublée d’un traître. Aujourd’hui, c’est le rôle que joue avec enthousiasme et constance la CFDT.

En avant pour la grève générale

Grève ! Strike ! Les grévistes prennent à nouveau la France en otage ! Comment ça c’est indécent de parler de “prise d’otage”, suite aux attentats et vraies prises d’otage ? L’indécence, connais pas. En plus, ces salauds de grévistes ne s’en prennent pas qu’à la France. En Belgique aussi, ça menace. Et puis, en Angleterre, il y a peu, le pays était au bord de la grève générale suite au débrayage de centaines de milliers de travailleurs, secteur par secteur, des universités jusqu’aux transports en commun. Heureusement, dans un dernier sursaut (de décence), les syndicalistes ont suspendu toutes les grèves en signe de deuil. Voilà des syndicalistes qui savent se tenir. God Save the Queen, et tant pis pour les augmentations et la dignité des travailleurs.

En France, rien de tel. Décidément, il manque un roi. Et maintenant voilà les fumiers de gauchistes qui se joignent aux syndicalistes preneurs d’otage. Ils appellent à une mobilisation contre “la vie chère” ce 16 octobre. La “vie chère”? Je vous demande un peu: est ce que Bernard Arnault proteste contre la cherté de la vie? Alors que lui doit payer des milliers d’hectolitres de kérosène (certes, moins taxé que l’essence) pour abreuver son jet et son yacht. Et rien, pas une protestation de sa part. On ne l’a pas entendu se plaindre contre la hausse du prix du caviar, alors qu’avec la guerre contre la Russie, c’est la misère côté caviar. Les riches sont des gentlemen qui savent prendre les adversités de la vie avec flegme.

Des transports en commun payés par les « super-profits » ?

Les pauvres, c’est autre chose. Leur indécence est si grande qu’on les entendrait presque réclamer des transports en commun gratuits. Et puis quoi encore? Vous voulez tout de même pas que les super-profits des pétroliers viennent financer le transport pour tous? Si le patron de Total augmente son salaire à 5, 9 millions (avec une hausse de 52% d’un an sur l’autre, quand on vous dit que le MEDEF est plus efficace que la CGT), ce n’est tout de même pas pour payer l’essence des manants. Cessons la démagogie et la gabegie.

A propos de gabegie, un article de Médiapart publie les conclusions d’une équipe de recherche qui a enquêté pendant deux ans sur les dépenses de l’État. Et, ho ! surprise! La part la plus importante des dépenses publiques va… aux entreprises. Près de 160 milliards, soit un tiers du budget de l’État ou plus de deux fois celui de l’Éducation nationale. Bonjour les assistés !

L’effet d’entraînement cassé par la CFDT

Mais revenons à nos preneurs d’otages. Les travailleurs des raffineries ont provoqué le chaos, “ont bloqué le pays” comme le dit si bien le député Eric Ciotti (du parti Reconquête!, ha non, pardon, Les Républicains). Dans un contexte de hausse généralisée des prix et de stagnation des salaires, la grève dans les raffineries devrait être le détonateur de nombreuses autres grèves, voire de la grève générale. C’est ce qu’a très bien compris la CFDT qui a donc décidé d’arrêter la grève. En bon syndicat jaune, effrayé par la moindre remise en cause de l’ordre existant, et surtout attaché à sa petite niche de cabot chez les dominants de cet ordre, la CFDT a cassé la grève avant qu’elle ne se généralise. En effet, en faisant défection, elle permet au gouvernement d’agir contre la grève. 

 

Le gouvernement Macron, un contre-maître au service du patronat

De même que la figure du “jaune” a disparu de notre vocabulaire, celle de “contre-maître” s’en est allé avec l’usine à papa. Pourtant, cette fonction de chien de garde du productivisme au seul profit des patrons n’a pas disparu. Mais elle est aujourd’hui occupée par le gouvernement. Si une mobilisation populaire peut réellement faire changer le cours des choses, c’est-à-dire améliorer un peu la vie matérielle de millions de personnes, alors le gouvernement utilisera toute sa force répressive. Il n’a pas hésité à violenter de toutes les manières qui soient les Gilets Jaunes. Aujourd’hui, il est prêt à violer le droit constitutionnel à la grève, en décrétant la réquisition.

Vers la guerre sociale

Rappelons que si ce droit -à la grève- est constitutionnel, c’est parce qu’il s’agit d’un des rares moyens d’action pacifique pour renverser le rapport de force avec le patronat. C’est avec la grève que la plupart des droits sociaux ont été acquis. Si le gouvernement ôte ce moyen d’action pacifique, il ne peut qu’obtenir des violences.

 

Paru sur Hiya! le 12 octobre 2022

 

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