Simplisme et complot, deux lectures opposées

J’avoue souvent préférer la simplicité, voire le simplisme, à la complexité. J’ai même eu tendance à me référer à des complots pour expliquer certains évènements. Pire, en fait, je n’ai pas l’intention de changer sur ces points. Mais il est vraiment temps de préciser ce qu’on entend par simplicité et complexité. Ce n’est pas la même chose de dire que puisqu’une centaine de personnes détiennent la moitié des richesses mondiales, elles sont responsables de la plupart de maux de l’humanité, et dire que puisque Daesh est contre Bashar, la rébellion syrienne est djihadiste. 

Ce sont certes deux propositions simples mais elles ont des fonctions totalement différentes. Dans un cas, le chiffre illustre toutes les injustices, la destruction de la planète et la captation de toutes les richesses par une oligarchie dont on peut clairement identifier les noms et prénoms de ses membres. Cela n’éclaire pas tous les rouages permettant cette aberration mais ça désigne le problème majeur de notre temps : les riches. La simplification permet la mobilisation et la compréhension, voire empêche de tomber dans une autre explication simpliste à la panade vécue, celle du travailleur étranger (quand bien même l’extrême-droite excelle à lier les deux phénomènes durant sa conquête du pouvoir, jamais après).

L’autre type de simplisme n’a pour but que de confondre pour mieux écraser : je suis ennemi de l’Etat Islamique, c’est donc que tous mes ennemis sont Daesh. La simplification ici ne joue pas un rôle pédagogique (comme celle des riches qui appelle à comprendre pourquoi et comment ils possèdent et détruisent le monde), elle ferme la compréhension en réduisant le monde à deux entités au détriment des multiples. Une fois le monde réduit à un affrontement entre deux, tout se rattache à l’un des pôles, de sorte que la moindre manifestation pour abattre un tyran ou même –pourquoi pas ?- défendre un acquis social, est forcément le fait d’une manipulation de l’ennemi. Et, en définitive, il s’agit d’une lecture qui appelle au renoncement, toute mobilisation étant par nature vouée à la manipulation.

Cela ne veut pas dire que les complots n’existent pas. Quand deux avions s’écrasent contre les tours de New York en 2001, la seule chose dont l’on soit sûr c’est qu’il y a eu une attaque concertée, soit précisément la définition d’un complot [Complot : Dessein secret, concerté entre plusieurs personnes, avec l’intention de nuire à l’autorité d’un personnage public ou d’une institution, éventuellement d’attenter à sa vie ou à sa sûreté. CNRTL]. Après, spéculer sur ses auteurs m’a toujours semblé une perte de temps, surtout à la vue du nombre de phénomènes provoqués par cet événement qu’il convient de comprendre.


Autrement dit, on peut parfaitement intégrer les complots dans l’histoire, sans en avoir une lecture complotiste, et on peut parfaitement simplifier l’histoire sans se convertir en un salaud.

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